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Vers un “New Deal” en Europe ? Premiers pas vers une consultation intelligente et une réglementation de la qualité dans l’UE.

par Philippe Portalier
27/01/2003

Selon une étude réalisée par EOS/Gallup pour la Commission européenne, les entreprises européennes se disent excessivement entravées par la mauvaise qualité de la réglementation. Ils estiment le coût de la réglementation à 4% du PIB communautaire. 15% de ce coût, soit 0,6% du PIB communautaire, pourraient être évités par une meilleure réglementation, ce qui représenterait une économie de quelque 50 milliards d’euros.

Même si le souci d’une meilleure réglementation remonte à 1992 lors du Conseil européen d’Edimbourg, il a été sérieusement examiné et politiquement renforcé lors du Conseil européen de Lisbonne en mars 2000. La Commission a déjà présenté un rapport intermédiaire (COM(2001)130) au Conseil européen de Stockholm et le Livre blanc sur la gouvernance européenne a proposé des orientations utiles (COM(2001)428). Depuis, un groupe consultatif de haut niveau, créé par les ministres de la fonction publique nationale en novembre 2000, a apporté une contribution importante et de grande qualité sur tous les aspects de ce problème. Le rapport du groupe, présidé par M. Mandelkern, contient une analyse approfondie des bonnes pratiques pour assurer une réglementation de qualité tout au long du cycle législatif[1].

Le Livre blanc de l’UE sur la gouvernance vise à une plus grande transparence dans l’adoption de nouvelles législations. Après une large consultation, la Commission européenne, critiquée pour sa bureaucratie et son éloignement des attentes des citoyens, a publié un Livre blanc sur la gouvernance. Le document conclut que “l’Union doit renouveler la méthode communautaire en suivant une approche moins descendante et en complétant plus efficacement ses instruments politiques par des instruments non législatifs. Quelle que soit la manière dont la politique de l’UE est préparée et adoptée, la manière de procéder doit être plus ouverte et plus facile à suivre et à comprendre”. La Commission s’engage à fournir.. :

Des informations actualisées et en ligne sur l’élaboration des politiques à toutes les étapes de la prise de décision. Il doit y avoir une interaction plus forte avec les gouvernements régionaux et locaux et la société civile.

C’est aux États membres qu’il incombe au premier chef d’y parvenir. Mais la Commission, pour sa part, :

. Établir un dialogue plus systématique avec les représentants des gouvernements régionaux et locaux par l’intermédiaire des associations nationales et européennes à un stade précoce de l’élaboration des politiques. assouplir les modalités de mise en œuvre de la législation communautaire de manière à tenir compte des conditions régionales et locales.

. Établir et publier des normes minimales de consultation sur la politique de l’UE.

. Établir des accords de partenariat allant au-delà des normes minimales dans des domaines sélectionnés, en engageant la Commission à procéder à des consultations supplémentaires en contrepartie de garanties accrues de l’ouverture et de la représentativité des organisations consultées.

La consultation sur le Livre blanc est toujours ouverte jusqu’à la fin du mois, où tout citoyen informé et connecté à l’Internet pourra faire part de ses commentaires. De nombreux groupes d’intérêt ont déjà répondu.

La Commission sur le point de proposer un plan d’action pour une législation plus simple et meilleure

Le 5 décembre 2001, la Commission européenne a adopté une communication intitulée “Simplifier et améliorer l’environnement réglementaire” (COM(2001) 726), qui souligne que “l’amélioration et la simplification de la réglementation restent une nécessité absolue pour l’avenir de l’Union européenne” et souligne la nécessité d’une stratégie coordonnée et opérationnelle des institutions européennes et des États membres, afin de répondre à 4 “préoccupations pressantes” :

. simplifier et améliorer l’acquis communautaire ;

. une législation bien préparée et plus appropriée ;

. une nouvelle culture au sein des institutions ;

. une meilleure transposition et application du droit communautaire.

Il annonce que la Commission proposera d’ici juin 2002 un plan d’action détaillé pour “simplifier et améliorer l’environnement réglementaire en Europe”.

Récemment, la Commission européenne (DG Entreprises) a présenté, avec le soutien politique du Commissaire Liikanen et du Directeur général Fabio Colasanti, les résultats de son “projet pilote d’évaluation de l’impact sur les entreprises”, qui a été réalisé sur la base de 4 directives techniques, à rédiger ou réviser.

Les principales conclusions du rapport sont les suivantes

. d’utiliser les analyses d’impact comme outil de prise de décision fondée sur la connaissance, en utilisant les avis de pré-évaluation et les lignes directrices générales sur le processus d’analyse d’impact ;

. utiliser les outils d’analyse appropriés, y compris les études économiques et autres études analytiques, l’analyse des risques, les lignes directrices techniques communes et l’échange de bonnes pratiques ;

. faire appel à l’expertise, y compris le recours accru à la consultation externe pour la collecte et la validation des données, des analyses et des idées, et la mise en œuvre de normes minimales clés pour la consultation ;

. améliorer la cohérence des rapports, y compris un dialogue précoce avec le Parlement européen et le Conseil, encourager l’apprentissage et le soutien continus, y compris la mise en place d’une unité centrale de contrôle de la qualité de la Commission chargée des responsabilités décentralisées des services chargés des analyses d’impact.

En outre, la Commission prépare deux autres rapports sur la “qualité de la réglementation” et sur “l’évaluation durable”. Le Conseil “Marché intérieur” devrait définir certaines priorités le 21 mai 2002.

Une consultation plus intelligente signifie utiliser les réseaux organisés de la société civile. Comme la révolution de l’Internet a apporté la “nouvelle économie de réseau”, les décideurs politiques mandatés (c’est-à-dire la “démocratie représentative”) doivent améliorer la qualité de leurs choix politiques en procédant à une consultation intelligente de la société civile organisée et en réseau (c’est-à-dire la “démocratie participative”). C’est la seule façon de trouver des solutions adéquates et fondées sur la connaissance à des questions complexes, qui sont acceptées par tous.

Une consultation intelligente signifie qu’elle doit être soigneusement planifiée, organisée, promue et menée de manière transparente. Comme le décrit le groupe Mandelkern, “les réseaux apparaissent comme une forme intermédiaire qui relie les partenaires indépendants d’une manière structurelle mais flexible, chacun contrôlant une partie des ressources et de l’expertise nécessaires à tous pour atteindre des objectifs communs. Les réseaux organisés et transparents sont les partenaires consultatifs les plus légitimes des décideurs politiques, car ils jouent le rôle d'”interface intelligente” entre les groupes directement concernés auxquels ils expliquent les objectifs politiques d’une législation envisagée et les décideurs auxquels ils font part des problèmes et des attentes.

Les experts ou consultants dits “indépendants”, qui sont souvent engagés par la Commission pour collecter des données sur un secteur spécifique, ne pourraient pas, dans la pratique, accomplir correctement leur travail sans l’aide d’un réseau de contacts au niveau tant régional que sectoriel. C’est pourquoi ils frappent souvent à la porte des associations professionnelles pour les aider à accomplir leur tâche. D’une manière générale, les milieux industriels refusent de continuer à être utilisés comme outils dans des procédures de consultation ou de coopération excessivement nombreuses et mal définies, tout en souhaitant être reconnus pour leur capacité à organiser par eux-mêmes des consultations au niveau européen.

Des changements culturels sont nécessaires pour sensibiliser à la fois les décideurs et les parties prenantes à leurs responsabilités.

Il est essentiel que les groupes d’intérêt soient plus ouverts et plus transparents afin d’apporter une contribution fiable au débat. Les propositions de la Commission concernant des normes minimales de consultation sont les bienvenues. Cela permettrait d’établir des règles claires et communes pour toutes les directions de la Commission en ce qui concerne les personnes consultées sur quoi et comment procéder. Ces normes doivent inclure des exigences d’ouverture et de transparence comme condition pour que les parties intéressées puissent participer aux exercices de consultation. Les garanties de légitimité et les preuves de représentativité, qui peuvent conduire à une procédure bureaucratique supplémentaire, sont moins importantes, car les organisations de la société civile sont statutairement responsables et responsables uniquement devant leur propre électorat.

Il est intéressant de noter que le Secrétariat de la Commission européenne a transféré le répertoire des groupes d’intérêt dans une base de données plus efficace qui permet aux associations d’enregistrer et de mettre à jour leurs données “en ligne”. Ce nouvel annuaire s’appelle CONECCS (Consultation, Commission européenne et société civile) et regroupe environ 1000 associations. La création d’une base de données des organisations de la société civile est une proposition utile, mais les organisations qui le souhaitent doivent être soumises à des exigences strictes de transparence et la base de données doit être gérée activement. En outre, la base de données ne doit pas être considérée comme la seule “porte” vers la société civile.

Comme l’a souligné l’équipe de gouvernance, cela nécessitera des changements culturels dans la manière dont les fonctionnaires de la Commission européenne procèdent pour rassembler l’expertise mondiale nécessaire, afin de produire des propositions législatives fondées sur la connaissance. Pour l’instant, de nombreux fonctionnaires craignent un fardeau administratif supplémentaire et des retards dans le processus réglementaire.

M. Harbour, membre du Parlement européen, a récemment déclaré qu’il était “absolument crucial” d’envisager des alternatives à l’élaboration des politiques. Les résultats d’une évaluation de l’impact sur les entreprises pourraient conduire les décideurs politiques à ne prendre aucune mesure ou à prendre une autre mesure que la législation sur le contrôle-commande. Cela nécessite un changement culturel, car l’élaboration des politiques dans les institutions de l’UE est actuellement un processus vertical, alors que les implications d’une nouvelle législation sont souvent plus horizontales et de portée plus large.

La réforme de la Commission a besoin d’un soutien politique et d’une coopération accrue entre les institutions européennes

Dans sa communication du 3 décembre 2001 (COM(2001)727final) préparée en vue du Conseil européen de Laeken, la Commission s’inscrit dans la ligne des propositions du Livre blanc sur la gouvernance visant à “redynamiser” le processus décisionnel politique communautaire initial. Il s’agit des positions de la Commission sur les questions liées à l’intégration européenne, notamment les travaux à venir de la Convention, qui visent à préparer la réforme des traités. Il rappelle également les initiatives prises par la Commission dans le cadre du débat public sur l’avenir de l’Europe.

Institution trop jeune, le Parlement européen a réaffirmé dans son rapport sur le Livre blanc sur la gouvernance du 28/11/2001 (par Sylvia-Yvonne Kaufmann COS 2001/2181), son rôle de colégislateur et dénoncé les cas qui pourraient entraver l’exercice effectif de sa responsabilité politique. Bien que moins direct, le Conseil européen (c’est-à-dire les États membres) a sa manière secrète de refléter les mêmes craintes. Une consultation approfondie et appropriée de toutes les parties intéressées est nécessaire pour mettre en évidence les conséquences indésirables d’un projet de législation ou pour déterminer l’équilibre des avantages et des inconvénients, ce qui permettra aux décideurs politiques mandatés, y compris les députés, de prendre les bonnes décisions.

C’est pourquoi il est primordial d’interconnecter les deux mondes de la démocratie “représentative” et “participative”. Les représentants des citoyens et des gouvernements n’ont pas toutes les connaissances nécessaires et les réseaux de la société civile n’ont pas toute la légitimité et l’expertise politique nécessaires, mais tout effort visant à les mettre en réseau contribuera à accroître simultanément la confiance dans les institutions européennes et l’acceptation des règles communes.

L’équilibre des pouvoirs, s’il doit être maintenu pour se prémunir contre des changements antidémocratiques, n’est plus un principe actif dans les pays européens. Pour faire face à des questions interrégionales et intersectorielles de plus en plus complexes, l’arrogance de la méfiance politique mutuelle est dépassée. Ce qu’il faut, c’est ouvrir davantage le processus politique à la société civile par des méthodes consensuelles. Espérons que l’année 2002 verra nos maîtres politiques s’attaquer à ce tournant historique de l’histoire de l’Union européenne !

1] Rapport final du groupe Mandelkern

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