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La mobilité en Europe et dans les BRICS : Pour quoi faire ? Une perspective Euro-BRICS – Viser la mondialisation via la diversité culturelle basée sur des identités clairement définies – Exposé de position-

Exposé de position de la rencontre en ligne Euro-BRICS, le 25 Novembre: ’Mobilité des étudiants en Europe et aux BRICS, visions parallèles‘  

Le temps et l’expérience sont les atouts majeurs de l’Europe en matière de programmes de mobilité étudiante. Mais, pour les BRICS, la mobilité étudiante s’inscrit dans ses défis du XXIème siècle. Un regard croisé sur ce thème constitue un sujet d’intérêt mutuel évident[1].

L’Europe dans les années 1980 / Les BRICS aujourd’hui: un même objectif, deux contextes

Lorsque la Communauté Européenne[2] a lancé, en 1987, le programme Erasmus de mobilité étudiante entre les pays européens, le contexte en la matière était le suivant :

  • Internet n’existait pas encore
  • Les échanges académiques concernaient principalement le corps professoral
  • La mobilité étudiante ne s’écoulait que d’Europe vers les Etats-Unis et ne concernait qu’un petit nombre d’individus
  • Le projet européen était sur le point de parachever son volet économique et de se tourner vers la création d’une union politique, qui nécessitait de former les futurs citoyens européens.

Afin d’ouvrir les jeunes esprits aux langues, à la diversité culturelle et à la dimension européenne, le programme Erasmus s’est développé sur la mobilité des étudiants eux-mêmes. Ce sont des leaders politiques influents de l’époque, tels que François Mitterrand en France, Helmut Kohl en Allemagne et même Margaret Thatcher en Grande-Bretagne, qui en ont initié la demande. Mais ça ne fut pas chose facile que de lancer cette démarche compte tenu de la réticence des Ministères nationaux de l’éducation qui percevaient ce programme comme une intrusion étrangère dans un secteur souverain. Et ce sont les étudiants eux-mêmes qui ont du faire équipe avec ces leaders politiques pour que le programme puisse enfin voir le jour[3].

La situation actuelle des BRICS présente des caractéristiques à la fois similaires et différentes qui méritent d’être relevées :

  • La mobilité universitaire concerne principalement les professeurs
  • Les flux sont extrêmement orientés (même si en déclin) vers l’Europe et les Etats-Unis
  • Internet est devenu le principal outil de connexion
  • La mobilité intra-BRICS n’a probablement pas pour objectif de créer une identité citoyenne BRICS; mais plutôt d’ouvrir les horizons et d’intensifier les relations entre des pays qui étaient soit insularisés (Chine) soit uniquement dirigés vers l’Europe et les Etats-Unis.
  • La mobilité dans les BRICS, comparée à celle de l’Europe, présente deux contraintes spécifiques : le nombre important d’étudiants potentiellement concernés et les longues distances séparant les pays impliqués.

La mobilité étudiante : Viser la mondialisation via la diversité culturelle basée sur des identités clairement définies

Partant du constat de ces caractéristiques différenciées, la question de « la mobilité étudiante : pour quoi faire ? » mérite d’être posée, tant pour l’Europe et pour les BRICS. En Europe, le programme Erasmus a été inséré dans le programme plus large Erasmus-Mundus[4] ; et l’objectif initial de forger une identité citoyenne européenne a été quelque peu laissé de côté. Comme nous l’avons vu, l’enjeu dans les BRICS est principalement de rediriger des flux universitaires vers des groupes de pays qui ont maintenant beaucoup à offrir en la matière. Il est certain que si les BRICS arrivent à créer les conditions pour attirer les étudiants des BRICS dans leurs universités, ils peuvent également se doter des dynamiques nécessaires pour attirer des étudiants des quatre coins du monde.

Malgré tout, le mot-clé de la mobilité étudiante demeure la « diversité ». La mobilité étudiante doit permettre de former de futurs professionnels et citoyens à l’environnement multiculturel dans lequel ils exerceront quelle que soit leur spécialité. Dans un monde globalisé, les pays comme les entreprises ont besoin de personnes globalisées pour gérer et faire progresser leurs activités, c’est-à-dire des personnes combinant des compétences en langues, une connaissance de différentes cultures et la capacité à interagir fructueusement avec des personnes issues d’horizon divers.

Par conséquent, les langues, les cultures et les relations interculturelles peuvent être considérées comme la valeur-ajoutée la plus évidente et la plus souhaitable de la mobilité étudiante.

Mais la globalisation a aussi tendance à produire une nouvelle sphère culturelle : globalisée, constituée de personnes parlant une seule et même langue, accédant à un corpus conceptuel monoculturel, uniquement capables d’échanger avec des personnes possédant une expérience similaire… un monde monoculturel donc, inévitablement déconnecté de la diversité culturelle des sociétés mondiales.

L’Europe a vécu cette évolution avec des universités souhaitant attirer les étudiants étrangers et finissant par dispenser des cours en anglais uniquement…La question qui se pose alors est : dans quelles mesures demeure-t-il utile d’étudier à l’étranger si l’on n’obtient pas plus là-bas que ce qu’on peut avoir chez soi ?

Pour palier à de telles dérives, la question de la mobilité en Europe et dans les BRICS devrait soulever la problématique suivante : comment les universités devraient-elles concevoir leurs programmes d’échange pour assurer une véritable immersion des étudiants-visiteurs dans un nouvel environnement culturel, conceptuel et linguistique ?

Prendre en considération les notions de préservation et de capitalisation de/sur la diversité mondiale laisse supposer que les étudiants eux-mêmes soient bien ancrés dans leur environnement culturel. Or, dans notre société actuelle, cet objectif n’est facilement atteignable qu’en apparence. En effet, la construction d’identités bien définies en Europe suppose, pour un étudiant, d’être mobile déjà dans son pays d’origine et en Europe; ceci afin de lui permettre de savoir qui il/elle est et d’où il/elle vient. De même, la mobilité étudiante dans les BRICS peut inclure d’être mobile au sein des grands pays qui composent leur groupe. Si l’on considère la taille et la diversité de l’Inde par exemple (la situation étant par ailleurs la même dans la plupart des BRICS, tout comme en Europe), ne serait-il pas souhaitable d’offrir aux étudiants indiens la possibilité d’étudier tout d’abord dans un autre état de leur pays avant d’entreprendre des études dans un pays étranger ?

Tirer profit des outils modernes d’interaction et d’éducation : Internet et la nouvelle « économie du savoir »

De nos jours, la mobilité étudiante revêt une caractéristique spécifique qui était absente dans les années 1980 : l’Internet. Cet outil joue un rôle primordial en permettant de répondre aux défis posés par la mobilité étudiante dans les BRICS et au XXIème siècle, à savoir les importants flux d’étudiants concernés par la mobilité, et les longues distances que ces échanges supposent.  Si l’on considère que l’objectif est de relier de jeunes individus avec la dimension multiculturelle mondiale, alors la mobilité géographique n’est pas le seul outil dont on dispose aujourd’hui. Les programmes de mobilité étudiante devraient également inclure un ensemble d’outils qui permettraient la construction en Europe ou dans les BRICS d’une communauté universitaire en ligne impliquant les étudiants.

La question de savoir quels étudiants devraient être sélectionnés pour étudier à l’étranger constitue également un axe central dans la définition d’un programme de mobilité étudiante. Le but est-il de former un petit nombre de futures élites ? Ou bien d’ouvrir des horizons au plus grand nombre d’étudiants ? Ces deux objectifs sont légitimes et peuvent être par ailleurs combinés ; en revanche, ils ne déboucheront pas sur la même stratégie. Il peut en effet paraître intéressant d’envoyer des étudiants, considérés comme de futures élites, pour de longs séjours à l’étranger. Alors que pour le public étudiant général, de courts séjours alliés à une implication dans des réseaux universitaires en ligne, tels que les MOOC’s (Massive Open Online Courses, modules de formation en ligne) par exemple, semblent suffisants pour mettre en place une génération de citoyens et de professionnels bien connectés.

Evoquer les MOOCs incite à réfléchir à la conception des programmes de mobilité étudiante au XXIème siècle, qui se doivent de prendre en considération les caractéristiques de la sphère académique d’aujourd’hui, bien différente de celle des années 1980. De nos jours, les étudiants se forment par eux-mêmes, grâce à une combinaison de cours dans des espaces physiques (tels que les écoles et universités), de cours en ligne et de stages en entreprises. Comment la mobilité étudiante peut-elle tirer partie des nouvelles possibilités offertes par l’économie du savoir de notre société actuelle ?

La mobilité étudiante et la fuite des cerveaux

La fuite des cerveaux est l’une des conséquences d’une mobilité étudiante mal-pensée et à laquelle il faut prêter une attention particulière. Dans certains pays d’Europe (en France par exemple), la mobilité étudiante a parfois plus à voir avec les chiffres du chômage qu’avec une véritable politique éducative : les études à l’étranger sont désormais un passage obligé du schéma d’études supérieures sans qu’aucune attention ne soit plus portée sur la personnalité de l’individu ou ses souhaits. Les histoires d’amour et les opportunités professionnelles qui peuvent découler d’une expérience à l’étranger conduisent beaucoup d’étudiants à ne pas rentrer dans leur pays d’origine. Ceci peut-être considéré comme un effet néfaste de la mobilité étudiante pour le pays d’origine qui ne bénéficie pas du retour sur investissement attendu, de même que pour les familles dont la cellule familiale est déstrusturée et pour l’équilibre de l’individu. Pour contrer cet effet, des moyens devraient être envisagés dès les premières étapes de conception de tout programme de mobilité étudiante.

Voici donc quelques problématiques et questions sur lesquelles le LEAP et le réseau Euro-BRICS auront l’occasion d’échanger lors de la troisième conférence en ligne du 25 novembre dernier.


 


[1] Le réseau Euro-BRICS du LEAP a tenu une 3ème discussion en ligne le 25 novembre sur le thème suivant : « La mobilité étudiante en Europe et dans les BRICS : Regards croisés »

[2] La création de « l’Union Européenne » remonte au Traité de Maastricht, ratifié en 1992. Avant cela, elle était appelée « Communauté Européenne » (CE) (et encore avant, « Communautés Européennes »)

[3]L’association étudiante trans-européenne, AEGEE-Europe, a joué à l’époque un rôle considérable pour parvenir à faire adopter ce programme.

[4] Erasmus-Mundus assure la promotion de la mobilité des étudiants Européens au-delà de l’Europe

 

À propos Marie Hélène

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