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Leçon d’Anticipation Politique N°2 – Premier pré-requis d’anticipation : “Un port à l’esprit”

Une étude attentive de l’histoire de l’Anticipation Politique a permis à LEAP de repérer trois pré-requis présidant aux capacités prédictives de Biancheri[1]: objectif, réseau et volonté.

Cette  “Leçon d’Anticipation Politique” présente le premier de ces pré-requis: “Objectif, un port à l’esprit”

On peut considérer qu’à partir du moment où il a créé AEGEE-Europe, mais plus précisément après avoir contribué aussi significativement via AEGEE-Europe à l’adoption du programme ERASMUS, Biancheri savait ce qu’il voulait. Il avait une vision claire de l’objectif général qu’il poursuivait, qui peut se résumer à ceci : “Je veux une Europe dont les orientations politiques soient influencées par les citoyens européens”. Ou formulé de manière encore plus simple : “Je veux une Europe démocratique”.

En anticipation politique, un “objectif” est à la fois simple et général. Mais, quel que soit le domaine auquel l’anticipation politique est appliquée (business, politique, particulier…), cet objectif est la condition préalable à toute tentative prédictive.

Définir son objectif est un exercice utile. Par exemple, certaines grandes institutions publiques ont tendance à appliquer des stratégies visant en fait à leur propre survie plutôt qu’à la poursuite de l’objectif pour lequel elles ont été créées au départ. Un exemple particulièrement évident de ce genre de déviance nous est fourni par l’OTAN. Cela dit, presque toute institution/organisation souffre de ce syndrome.

De manière intéressante, en dupliquant ce travail de clarification d’objectif au secteur privé, on découvre que les entreprises également, qui sembleraient plus légitimes à poursuivre un objectif d’auto-survie, y gagneraient à passer à un objectif fondé sur le concept de mission.

Le “désir” induit par la visualisation d’un objectif créé de fait un mouvement de projection vers l’avenir. Lorsque Biancheri avait 22 ans et qu’il démarrait l’association AEGEE-Europe (1985), peut-être pensait-il encore que l’avenir était une terre vierge de possibilités. Mais après avoir constaté combien il est difficile d’être entendu par les décideurs politiques à l’occasion de son action en faveur d’ERASMUS, après avoir expérimenté les difficultés techniques et politiques liées à la conduite d’une campagne trans-européenne lors de l’élection européenne de 1989, et après avoir analysé les risques de dérive de la construction européenne presents en germe dans le Traité de Maastricht, il est certain qu’en 1992, Biancheri savait que sa “vision d’une Europe démocratique” nécessitait une compréhension fine des échelles de temps et une grande humilité en leur présence. C’est ainsi que la projection vers l’avenir permise par la visualisation d’un objectif est rapidement suivie par la conscience des paramètres temporels liés à la satisfaction de cet objectif.

La période de temps qui s’étend entre maintenant et la satisfaction de l’objectif apparaît alors comme à la fois un obstacle et un allié : un obstacle dans le sens où il constitue un mur infranchissable séparant l’individu de son but, imposant la patience; un allié parce que cette période de temps est aussi ce dont l’individu a besoin pour mettre en oeuvre sa stratégie, imposant l’action.

Cette période de temps, initialement vide, se remplit alors d’idées d’actions destinées à emmener vers le but – plus densément dans l’avenir proche. Mais en se remplissant de projets, cette période se remplit aussi de faits. Par exemple, les événements sont programmés en prenant en compte de nombreuses considérations liées à l’avenir : vacances, agenda parlementaires, présence des media liée à des événements importants, priorités politiques exprimées… Pour augmenter les chances de succès et d’impact des actions que nous programmons, un paysage de l’avenir doit être pris en compte (analyser la meilleure localisation possible, le meilleur moment, et le meilleur thème selon un environnement donné qui s’étend dans l’avenir et nécessite d’être exploré).

Parallèlement à ce “remplissage de l’avenir” lié à la programmation d’actions, et au fur et à mesure que l’expérience s’accumule (succès, échecs et intelligence des ressorts à l’oeuvre), l’objectif que l’on s’est fixé apparaît de plus en plus comme un horizon mouvant, dont la satisfaction ne saurait être qu’incomplète et temporaire. C’est ce que Biancheri a révélé lorsqu’il a commencé à utiliser le mot “démocratisation” en lieu en place du mot ‘”démocratie” : il n’existe pas d’état de démocratie  parfait et éternel ; ce qui compte c’est l’effort constant dans cette direction. Mais une Europe démocratique est un état idéal qui sera constamment remis en question par un environnement changeant.

A ce stade, l’image de comment l’avenir doit être compris et donc abordé est complète, et l’exercice prédictif peut commencer.

A suivre…


[1] L’anticipation politique est issue du talent d’un homme, Franck Biancheri, à prédire correctement des événements et changements, et à en déduire actions et recommandations stratégiques… un homme qui ne croyait pas aux talents venus de Dieu, et qui chercha à comprendre d’où il tenait cette capacité. Lui et Marie-Hélène Caillol ont alors œuvré à formaliser cette méthode empirique via la tenue de formations (Sorbonne-LEAP, IRPA) et la rédaction d’un Manuel d’Anticipation Politique en 2009.

À propos Marie Hélène

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