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Estimer l’impact d’Eurorings (un système décentralisé) sur le statut des fonctionnaires européens

 

Note de synthèse – Séminaire Eurorings (Francfort, 24 février 2003)
07/03/2003

 

L’objectif du troisième séminaire EuroRings qui s’est tenu le 24 Février 2003 à Francfort en coopération avec la municipalité de Francfort était d’analyser l’impact d’un système communautaire politique et administratif décentralisé sur la fonction publique communautaire. Grâce à la quinzaine d’experts présents, il a été possible d’aborder de manière très originale et innovante le difficile problème de l’avenir de la fonction publique européenne, en l’étudiant sous un axe nouveau, son adaptation à un système multicentré ; tout en le replaçant dans le contexte général de la réflexion sur la fonction publique qui existe dans tous les Etats-Membres.

« Multicentré » et non plus « décentralisé » : c’est en effet l’un des résultats théoriques importants du séminaire de Francfort. Les débats ont permis de définir plus fidèlement le concept sous-tendant EuroRings ; et il est apparu que sa distribution géographique et son architecture institutionnelle ne rentraient pas dans une logique de décentralisation (qui suppose un centre précis) mais plutôt dans une logique multicentrée, puisque chaque ville/région/institution constitue en soi un centre autonome, en interaction avec les autres.

Parallèlement, il a été rappelé que plus qu’en termes de niveaux administratifs (local, régional, national et communautaire), c’est en termes de fonctions (locale, régionale, nationale et européenne) qu’il faut penser la diversité administrative communautaire.

Par ailleurs, comme le montre l’exemple de la Banque Centrale Européenne (qui a déjà mis en place plusieurs des recommandations retenues par le séminaire), l’innovation en matière de gestion des ressources humaines de la fonction publique communautaire est d’autant plus réalisable que l’institution est nouvellement créée. Cela concernera peut-être les possibles nouvelles institutions qui seront chargées de gérer le volet politico-économique de l’Euro ou bien le pôle défense-relations extérieures, et qui ne rassembleront que certains Etats-Membres. En l’état actuel des choses (et l’élargissement à 25 Etats-Membres risque de ralentir encore plus toute évolution positive), il y a peu d’espoir de voir les institutions communautaires historiques moderniser de manière décisive la gestion de leurs ressources humaines.

Plusieurs grandes orientations se sont dégagées qui ont rassemblé l’ensemble des intervenants et participants.

1. La décentralisation du système communautaire promu par EuroRings répond notamment à une volonté de rapprocher les institutions européennes des citoyens. Il est donc impératif que la fonction publique qui servira ces institutions soit conçue dans le même but : réduire l’espace séparant les citoyens des fonctionnaires communautaires.

2. Simultanément, la nature multicentrée du système communautaire décrit par EuroRings génère deux contraintes spécifiques pour assurer son efficience :

a. La nécessité d’une très forte mobilité inter-institutionnelle des personnels pour éviter le cloisonnement et la fragmentation du système

b. La mobilité externe comme condition d’utilisation optimale des différents bassins d’emploi des villes/régions accueillant les institutions.

3. Parallèlement, le rapprochement des citoyens, comme la nécessité de mobilité interne et externe, imposent la mise en place d’une fonction publique communautaire fondée sur des contrats de droit privé et libérée des différents privilèges et immunités acquises dans les années de fondation de l’UE.

4. L’osmose avec la société européenne comme le recours à la compétence professionnelle comme principaux facteurs de recrutement imposent le ciblage sur le recrutement en milieu de carrière et la suppression du processus de concours comme d’emploi à vie.

5. La mobilité au sein du système et entre le système institutionnel et l’extérieur peut-être obtenue par deux grands types de moyens : l’incitation ou la durée limite. L’incitation peut notamment jouer un rôle, comme à la BCE, dans la décision d’offrir une progression de carrière uniquement liée au mérite et à la performance dans certaines limites raisonnables et de mettre la compétition au cœur u système de promotion hiérarchique, ou de plafonner les salaires (au contraire des systèmes de rémunérations indexées sur l’ancienneté). La durée limite consisterait à fixer une durée maximale d’appartenance à une institution communautaire donnée (5 ans ou 10 ans sont des durées envisageables), tout en permettant la mobilité vers une autre institution.

6. L’insertion des institutions dans le contexte culturel de leur ville/région/pays d’accueil est essentiel à leur bon fonctionnement. Ainsi, le soutien par chaque institution au développement d’écoles européennes ou internationales, ouvertes et accessibles aux enfants des citoyens de la ville/région d’accueil, apparaît comme un objectif central. Il permet d’empêcher le fonctionnement en « autarcie culturelle et sociale » de l’institution (comme cela se passe actuellement avec les principales institutions communautaires) et stimule les échanges humains.

7. Le recours à des personnels sous contrat privé apparaît comme le meilleur moyen de conserver un contrôle politique effectif sur les institutions communautaires, en évitant notamment deux risques démocratiques majeurs illustrés par l’actuel système :

a. Le recours croissant à des contractants externes pour assurer des tâches essentielles (cf. les multiples problèmes créés par les BAT à Bruxelles), échappant à tout contrôle politique sérieux

b. La création d’une bureaucratie communautaire, à vie, échappant pour l’essentiel au contrôle des politiques démocratiquement élus.

La perméabilité entre administration et société apparaît en effet comme une caractéristique commune à toutes les démocraties dynamiques.

8. La mobilité entre administrations locale, régionale, nationale et communautaire apparaît également comme une piste d’avenir prometteuse, assurant non seulement une ouverture nécessaire du système communautaire sur les autres fonctions administratives ; mais aussi une diffusion large au sein des administrations locales, régionales et nationales des contenus et méthodes communautaires.

9. Enfin, le maintien d’une large diversité en terme de nationalités reste une exigence incontournable tant en termes de crédibilité politique des institutions communautaires que d’efficacité opérationnelle. Cependant, la flexibilité requise impose d’éviter à tout prix la mise en place d’un système de quota nationaux en promouvant au contraire un système de « minimum-maximum ». Le système de quota n’était pas dans l’esprit des fondateurs de la Communauté européenne mais s’est peu à peu imposé dans le discours et la pratique des actuels dirigeants communautaires. Les travaux du séminaire ont au contraire souligner la pertinence d’une approche fondée sur une fourchette (minimum-maximum) permettant tout à la fois d’assurer la diversité des nationalités présentes dans les institutions ainsi qu’une représentation minimale à tout instant d’une nationalité donnée (et exclue toute sur-représentation durable d’une nationalité quelconque) ; mais aussi d’assurer la flexibilité nécessaire pour l’allocation des fonctions aux meilleures compétences.

Les grandes orientations et les recommandations concrètes issus des travaux de ce troisième séminaire EuroRings s’inspirent de politiques concrètes mises en place dans certains Etats-Membres comme dans de nouvelles institutions communautaires comme la BCE. Elles montrent que l’aspiration à une Europe multicentrée en termes d’institutions impose de revoir radicalement le concept de fonction publique hérité des années 50 et d’un modèle pyramidal. C’est seulement au prix de ces changements significatifs que les administrations communautaires pourront retrouver crédibilité, légitimité et efficacité. Il est néanmoins à craindre que les lourdeurs et l’opposition à la remise en cause de privilèges et situations acquises depuis plus de 50 ans rendent cette tâche très difficile pour les institutions de l’UE à 25.

Au contraire, le champ est ouvert pour les nouvelles institutions ou agences européennes spécialisées qui sortiront des coopérations renforcées qui ne manqueront pas de naître dans les années à venir.

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